Plus tard, c’est jamais maintenant

Envie de participer au Carnaval de Charleroi ?

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Vous hésitez encore à nous rejoindre mardi pour assister au Carnaval de Charleroi ? Deux arguments de choc pour vous convaincre : Il va faire soleil (si, si !) et les participants de la Grande Parade du Carnaval seront deux fois plus nombreux et colorés que l’année précédente. Petit coup d’œil dans le rétro avec un reportage sur le Carnaval 2017 pour vous mettre dans l’ambiance pour 2018 !

28 février 2017. Malgré le commentaire entendu sur Bel RTL regrettant que « le bon Dieu ne soit pas souvent binchou », la météo est plutôt de la partie en Wallonie, ce matin-là. Plus que les badauds… Parce qu’à 9 heures 30, on ne peut pas dire que ça s’agite des masses à Charleroi. À l’exception d’une drôle de troupe qui squatte depuis quelques jours l’ancien réfectoire de l’Université du Travail. Celle de la Grande Fabrique du Carnaval, menée par le centre d’expression et de la créativité de L’Eden. Aux manettes, un escadron de doigts de fées : Isabelle Marez, Laurence Vits, Sandrine Schenkel, Ornella Marotta, Daniele Bossi et Vincent Colinet.

L’effervescence…

L’agencement du lieu, ce jour-là, ressemble d’ailleurs à une gigantesque boîte à couture. Compartimenté en zones, l’immense hall s’apprête à accueillir pour les ultimes ajustements de costumes et répétitions les 17 groupes « Effervescence » de l’Eden qui rejoindront dans quelques heures le cortège folklorique du Carnaval de Charleroi. Grâce aux accessoires déposés sur les tringles et les tables, on peut s’amuser à deviner qui est qui. Les casques ornés de plumes ? C’est sûrement pour les échassiers urbains, les Kangoo Mountain Risers. Les costumes bicolores aux jambes interminables ? Fastoche, c’est pour l’école de cirque, Circomédie, qui regroupe monocyclistes, trapézistes et… échassiers.

80 % de récup’

Et les jupes-cerceaux à pompons ? « C’est pour le groupe d’Accueil Temps Libre, commente la créatrice textile Laurence Vits, l’une des talentueuses petites mains qui depuis des semaines récupère les bouts de tissus et petits objets du quotidien pour les détourner, les tordre, les coudre, les peindre, les coller… et leur redonner ainsi une seconde vie – environ 80 % des créations proviennent du recyclage. C’est la deuxième année que je collabore à la préparation du Carnaval. Ce qui me plaît dans ce projet, c’est le plaisir d’échanger humainement et artistiquement. Les idées fusent. Nous sommes là pour les canaliser : on guide les participants en fonction de leurs forces et de notre thématique. Cette année, on avait choisi l’effervescence. On recherchait des couleurs, des contrastes, du mouvement, de la hauteur. » D’où les hauts totems et grigris colorés qui vont ponctuer le cortège, les innombrables grappes de ballons, les coiffes démesurées que vont arborer les élèves et profs du Conservatoire Arthur Grumiaux et les danseurs de Bouger dans la rue…

Le Carnaval de l’intérieur

Certains groupes avaient déjà participé au Carnaval l’an dernier. Pour d’autres, c’était une première. Leurs motivations ? « On va pouvoir faire connaître notre discipline au public dans de fantastiques conditions », se félicite Miralda du groupe Kangoo Mountain Risers. Despina, représentante du groupe d’Accueil Temps Libre, souhaite elle aussi donner de la visibilité à son équipe : « Nous sommes une dizaine à défiler mais beaucoup plus à avoir participé en amont à la confection des pompons. Les enfants nous ont bien aidé ». Ce qui a incité Christina, formatrice chez Avanti, à faire partie de cette aventure, c’est « l’envie de vivre le Carnaval de l’intérieur, de réfléchir et participer au projet en compagnie des stagiaires, de défiler avec d’autres associations. Le cortège, il matérialise aussi l’esprit solidaire ». Un avis que partage Marie, la responsable de Circomédie : « J’y vois une occasion de mieux connaître les associations partenaires, mais aussi d’impliquer les familles qui fréquentent notre école de cirque dans un projet qui dépasse notre cadre habituel. Avec les enfants, par exemple, nous avons choisi les messages que nous allons accrocher aux ballons qui vont être distribués pendant la parade ». Des phrases comme « L’amour enseigne ce que la haine ne peut pas apprendre » ou « Le bonheur est la seule chose qui se double si on le partage »…

Ensemble, c’est tout

Au fur et à mesure que l’horloge tourne, l’agitation grimpe dans le réfectoire. Tandis que les drôles d’oiseaux d’Avanti devisent au bar autour d’un café, ceux de Roll & Ride s’échauffent dans une certaine cacophonie. Pas moins de quatre fanfares répètent dans le lieu, l’Amicale de la Nouvelle Orléans, Les taupes qui boivent du lait, Nihil Obstat et la fanfare bidon. Les Gays Lurons se parent de collerettes jaunes et enfilent des chaussettes orange sur leurs chaussures. Après avoir esquissé quelques pas, les danseurs de Peggy Francart trinquent en cercle. 14h50, c’est visiblement l’heure de procéder aux raccords maquillage et pour les fumeurs, de griller une dernière cigarette. Les groupes vont bientôt s’aligner, selon les indications de la coordinatrice artistique, Isabelle Marez. Un cortège surréaliste, qui mélange des univers que, a priori, tout oppose, mais qui brille pourtant par sa cohérence. Ce qui donne corps à cet ensemble hétéroclite, la force qui s’en dégage, c’est l’envie qui anime tous les participants de faire et de vivre ensemble un moment unique.

Un joyeux bordel

Reste une inconnue : le public. Comment va-t-il réagir ? Va-t-il apprécier les brouettes remplies de goodies qui lui sont destinés ? « Je trouve vraiment chouette cette idée de partage, commente la styliste, Ornella Marotta. Les masques et les maracas que nous allons donner durant la parade ont été réalisés par les citoyens qui ont fréquenté la Grande Fabrique qui se tenait à l’Eden tout le mois de février. » En amont du Carnaval et le jour J, quelques 350 personnes ont ainsi été mobilisées. Parmi elles, Margarete : « J’avais envie de voir l’envers du décor et j’ai été servie. C’est étonnant qu’à partir de deux fois rien, on puisse inventer autant. Et que ce soit si « classe ». Mais ce qui m’a le plus touchée, c’est cet amour que tout le monde a mis dans la préparation de l’événement, pour présenter autre chose, entraîner les gens, que ce soit réussi… ». Comme le résume Alexandra, une autre habituée : « La Grande Fabrique, c’est un joyeux bordel ! On y vient pour l’aspect créatif – récup – DIY mais aussi pour l’atmosphère conviviale, le fait que ce soit gratuit et ouvert à tous… C’est un projet qui amène du lien social et on en a besoin ».

De la chaleur humaine

À l’angle de la rue Lebeau et de l’avenue Jules Henin, les groupes de l’Eden vont rejoindre le cortège folklorique, composé, notamment, des Spirous de Charleroi, des Climbias, des Chinels de Fosses, des chars du troisième âge et du Sporting de Charleroi et bien sûr des Géants, dont la petite dernière Julia, imaginée par les équipes créatives de l’Eden et les citoyens pour les 350 ans de la ville. Tout au long de la parade, des « oh » et des « ah » lancés par des Carolos de tous les âges qui (sou)rient, dansent, applaudissent, capturent l’événement avec leurs smartphones et envoient aux participants des pluies de confettis, de serpentins et de spaghettis multicolores. L’ambiance est bonne enfant. La météo, au rendez-vous. Mais ce qu’on retiendra, surtout, à l’issue de la parade, c’est la chaleur humaine.

Une place pour chacun

17h50. Après avoir rejoint les sociétés de Gilles sur la place du Manège et salué le Collège communal vêtu d’habits d’époque, les groupes regagnent le réfectoire pour se changer et échanger leurs impressions. « Au début, j’avais froid… et puis, j’ai vu les visages émerveillés des petits, confie l’une des élèves du Conservatoire Arthur Grumiaux. Le Carnaval, c’est un projet qu’on travaille depuis longtemps avec les profs. Je suis contente d’être allée au bout ». Impressionnant également, l’énergie qui transcendait le cortège. « Quand on entend la musique, c’est parti, plus rien ne nous retient, confiaient les créatifs de l’Eden. Quel plaisir de faire vivre nos costumes et de donner de la vie à notre ville ! » Et Despina, du groupe d’Accueil Temps Libre, d’ajouter : « La démarche a permis de mettre tout le monde en mouvement, même les personnes qui ne sont pas issues du milieu culturel artistique. On sent que les citoyens s’emparent du Carnaval ».

Place au renouveau

Les citoyens avaient aussi été sollicités pour déposer anonymement leurs idées noires à l’Eden durant la Grande Fabrique. Récoltés dans de grands sacs de jute, ces écrits, dessins, calligraphies seront glissés vers 19 heures, après le rondeau final, dans le ventre du grand corbeau dressé place du Manège. Ce bonhomme hiver de six mètres cinquante de haut, conçu par l’artiste Loeïz Le Guillerm, sera ensuite brûlé afin de chasser symboliquement toutes les idées noires en même temps que l’hiver. Un grand feu cathartique qui laissera la place au renouveau et au prochain Carnaval.